Covid-19 : Raccourcir la quatorzaine, une bonne idée ?
Les autorités françaises envisagent de réduire la quatorzaine alors que des études montrent que l’essentiel des contaminations du Covid se fait dans les deux jours avant et les cinq jours après les premiers symptômes.
Sept jours, dix jours ? On pourrait bientôt ne plus parler de quatorzaine pour l’isolement volontaire auquel se soumettent ceux qui sont testés positifs au Covid et les personnes avec lesquelles ils ont été en contact. Olivier Véran, le ministre de la Santé, a confié samedi sur BFM que deux semaines, c’est « sans doute trop long » pour les cas contacts. La question sera arbitrée lors du prochain conseil de défense.
Les parents qui doivent refaire l’école à la maison après un cas de Covid dans la classe de leurs enfants, les salariés renvoyés dans leurs pénates après qu’un collègue a été positif le savent : quatorze jours à domicile, c’est long et parfois intenable « Un isolement plus court serait un bon compromis pour une mesure à la fois acceptable pour la société et protectrice pour la santé selon les dernières données disponibles », souligne Franck Clarot, vice-président de la fédération des radiologues (76). Alors les pouvoirs publics pourraient être tentés de proposer une mesure plus facile à accepter. Surtout qu’en épidémiologie, on sait que les préconisations sont respectées si elles sont comprises. « Difficile de coincer des personnes chez elles pour des symptômes qui ressemblent à un rhume… » pointe la professeure en maladies infectieuses Anne-Claude Crémieux.
La connaissance du virus s’est affinée
Mais cette éventuelle décision s’appuie aussi sur des arguments médicaux. « Au début, la communauté scientifique avait posé quatorze jours en se basant sur l’incubation, rappelle Anne-Claude Crémieux. On estimait alors que sans symptôme, passé ce délai, il n’y avait pas d’infection. Depuis, notre connaissance du virus s’est affinée. » On sait désormais que l’on est contagieux 48 heures avant la survenue des symptômes, puis 8 à 10 jours après. C’est plus long pour les cas sévères et les immunodéprimés, mais ceux-ci étant le plus souvent hospitalisés, ils sont très surveillés. « Aux Etats-Unis, le centre des maladies préconise ainsi 10 jours sans contacts », précise Anne-Claude Crémieux.
Selon les dernières études, l’intervalle durant lequel la majorité des malades reste contagieuse, et durant lequel la charge virale est la plus forte, c’est deux jours avant les premiers symptômes et cinq jours après. Mais le compte à rebours qui vaut pour un malade ne fonctionne pas avec un cas contact : « Il faut attendre pour lui au minimum 12 jours après la possible contamination : 5 jours pour l’incubation, puis 7 jours pour évacuer le risque de contagion », relativise l’épidémiologiste Martin Blachier.
« Ce qui m’inquiète ce sont les trop nombreuses quatorzaines inutiles, signe que les Français ne comprennent pas bien les situations à risque. Et qui a pour conséquence d’engorger les centres d’analyse », soupire Martin Blachier. Et de marteler : pour être contaminé, il faut avoir passé du temps en intérieur avec la personne malade, que ni l’un ni l’autre ne porte de masque, et le plus souvent lui avoir parlé.
Le problème de l’accès rapide aux tests
La durée de la quatorzaine bute aussi sur le difficile accès aux tests. En ce moment, en cas de soupçon, on perd facilement 24 heures avant de trouver une place dans un labo, puis les résultats arrivent parfois trois-quatre jours après. Sans compter que la technologie PCR détecte des bouts de virus, mais ne peut pas indiquer précisément si la personne est contagieuse. Dans ces conditions, le temps qu’un malade infecté reçoive son résultat positif, il est quasiment déjà sorti de la « zone rouge » où il risque le plus de transmettre le Covid.
En Allemagne, le professeur Christian Drosten, grand virologue reconnu, propose un arrêt systématique de cinq jours, sans test préliminaire. La proposition étudiée favorablement par la classe politique allemande intéresse aussi le monde médical français. « C’est une approche pleine de bon sens qui prend en compte les capacités réelles », commente Etienne Decroly, directeur de recherche au CNRS.
> Si vous êtes malade : isolement dès l’apparition des symptômes.
> Si vous êtes un cas contact : isolement recommandé mais consignes à adapter aux situations. Avec symptômes : dépistage et isolement jusqu’au résultat du test (puis consignes selon le résultat). Sans symptômes : isolement puis dépistage au moins 7 jours après le dernier contact avec le malade.
> Si vous vivez avec un malade : isolement jusqu’à 14 jours après la guérison du malade.
> Si vous êtes cas contact d’un cas contact : pas d’isolement