Mawloud, gamou, bourd : Imam Babacar Fall livre le sens

Le Gamou sera célébré la nuit du dimanche 15 au Lundi 16 septembre 2024. En prélude à ce grand rendez-vous de la communauté musulmane dans la ville sainte de Tivaouane, Imam Babacar Fall de la cité Mbaba Guissé revient sur les origines et l’évolution dans le temps du Gamou ou Mawlid ainsi que de la Bourde.

Origine du «Gamou »

El Hadji Malick SY (1855-1922) était à la fois maître coranique et cultivateur. Il est né dans le Walo plus précisément à Gaya. Il a connu une formation coranique dans une famille religieuse. Au cours de l’histoire, il s’implanta à Ndiardé, un village qui se trouve dans le Cayor avec ses disciples où il avait des champs. Ndiardé était une zone enclavée et pour écouler ses produits, El Hadji Malick se rendait à Tivaouane, un carrefour où de grands commerçants venus de partout se rencontraient. C’est ainsi qu’il rencontra de puissants commerçants d’ethnie Lébou venus de Ouakam qui avaient remarqué sa sagesse et sa maitrise du Coran. Il est important de souligner qu’auparavant, le Cayor était peuplé par les « cedo », c’est-à dire des personnes qui ne se souciaient pas de la religion et ne vivaient que pour le plaisir. Étant donné que ces commerçants lébou d’obédience musulmane faisaient le commerce là-bas, la nécessité d’avoir un maître coranique pour les aider à apprendre et comprendre le Coran s’imposait à eux car la zone n’en avait pas. C’est ainsi qu’ils sollicitèrent El Hadji Malick Sy. Ce dernier accepta sans condition et rejoint Tivaouane à la demande de ces dignitaires venus de Ouakam. Quand bien même, il n’abandonnera pas son domicile à Ndiardé car, de temps à autre il s’y rendait. C’est ainsi qu’il commença à leur enseigner et à traduire le Coran. Il fut le premier à célébrer le Gamou que nous connaissons aujourd’hui en 1902. En effet, les « cedo » avaient une fête nommée Gamou qui n’avait aucune caractéristique religieuse. Elle consistait à les réunir pour danser et boire de l’alcool, que du plaisir toute la nuit. El Hadji Malick SY parvient à les convaincre qu’il pouvait changer la forme de cette fête et commença à convertir les « cedo » à l’Uslam. Plus tard, parmi eux, il y en avait qui sont devenus des muezzins, des imams. Petit à petit, l’Islam gagne du terrain dans le Cayor. C’est ainsi qu’il instaura le Gamou différent du Gamou que connaissaient les « cedo », il nomma celui-ci Mawlid mais comme ils avaient déjà trouvé le nom Gamou, El Hadji Malick Sy conserva ce nom. Donc, le nom Gamou vient des « cedo ».

Evolution du Gamou

La manière dont nous célébrons le Gamou aujourd’hui est différente de celle de la première édition en 1902. En effet, lors de la première édition qui s’est tenue le 12ème jour du mois de la naissance du Prophète Mouhammad (PSL) Rabi al-awwal, El Hadji Malick Sy avait divisé le Coran en deux parties avec son disciple El Hadji Rawane Ngom de Mpal. El Hadji Malick prenait la première partie et son disciple la deuxième. Ils lisaient le Coran et le moment de clôture de la lecture du Coran coïncidait avec la levée du jour. Donc, la première édition n’était consacrée qu’à la lecture du Coran. C’est ainsi que les autres disciples d’El Hadji Malick Sy ont demandé à ce dernier à participer à la veillée de la nuit du Prophète. Suite à cette demande, El Hadji Malick Sy changea le concept du Gamou lors de la deuxième édition. Dorénavant, au lieu de réciter uniquement le Coran, des louanges dédiées au Prophète et parlant de son vécu, son comportement envers les autres, y sont incluses pour inciter les disciples à prendre l’exemple du Prophète et cette nuit devient une veillée religieuse.

Ainsi, soulignons que l’année de naissance du Prophète est encore problématique car certaines versions disent 570, d’autre 571 av J.C, de même que le mois et le jour. Certains spéculaient que c’est le 1 jour du mois Rabi al-awwal d’autres 2ème jour ainsi de suite. Force est d’admettre que Seydi El Hadji Malick était un érudit, de son côté, il a fait des recherches en prenant en charge les spéculations des uns et des autres afin de conclure de son côté que c’est le 12ème jour du mois Rabi al-awwal. Cependant, pour permettre à ses disciples de tomber sur la nuit du Prophète et d’obtenir la baraka de cette nuit, le grand érudit trouve la solution selon laquelle à l’entame du mois Rabi al-awwal, du 1er jour au 12ème  jour, ils vont célébrer la nuit du Prophète excepté le 11ème jour du mois qui sera consacré au repos pour préparer le jour retenu par El Hadji Malick Sy pour le Mawlid al-Nabawi, d’où le Bourde. Cette dernière est un poème de Mouhammad Al Boussayri, il comporte 160 vers divisés en 10 chapitres. Donc, chaque jour, un chapitre est récité jusqu’au 10ème jour du mois de la naissance du prophète.

Pourquoi ce Poème ?

Non pas parce que El Hadji Malick Sy n’a pas de poème dédié au Prophète, contrairement il en a beaucoup écrit qui pouvaient d’ailleurs constituer pour chaque nuit jusqu’au 10ème jour un texte à réciter. Mais il en a jugé autrement de mettre à côté ses écrits et d’opter pour le poème de Mouhammad Al Boussayri qui, selon l’histoire, à travers un rêve  a vu le Prophète qui, par la suite, l’a soigné de sa maladie grâce à son poème intitulé Al Bourda afin de profiter et de faire profiter ses disciples de ce miracle.

« Atteint d’une hémiplégie, le poète panégyriste Mouhammad Al Boussayri a composé « Al Bourda », poème comprenant 160 vers en espérant une intervention du Prophète Mouhammad (PSL) auprès de Dieu pour sa guérison. Quand il l’eût terminé, il vit une nuit en rêve le Prophète passer sa main sur le côté paralysé de son corps et jeter un manteau sur lui. A son réveil, il se trouva complétement guéri et se garda de divulguer le miracle dont il était l’objet. Mais la nouvelle se répandit malgré sa discrétion et la « qassida » reçut le nom « Bourda » (manteau) ou encore « Bour-a » (guérison) selon certains pour les motifs que nous venons d’évoquer », extrait du livre Al Bourda de Mouhammadou Boussayri, publié par Djibril Guirane.

 

 

Source : Sudquotidien

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