Lutte contre les inondations : l’éternel recommencement
Avec un Plan décennal (2012-2022) financé à coup de centaines de milliards de FCFA, le Sénégal n’arrive toujours pas à se départir des inondations. A chaque saison des pluies, les populations trinquent, obligeant les autorités étatiques à recourir au Plan d’organisation de secours (Orsec), déclenché chaque fois que de besoin. Là aussi, c’est une réponse d’urgence à coût de milliards.
Les quelques millimètres de pluies enregistrés à Dakar et dans les régions ces derniers jours ont occasionné d’énormes dégâts, avec des routes coupées, des villes complètement sous l’emprise des eaux. Malgré les Plans d’organisations des secours (Orsec) qui se sont succédé et les centaines de milliards investis, le Sénégal subit chaque année le diktat des eaux de pluies, occasionnant des inondations qui nuisent aux populations.
Pourtant, le 25 juillet dernier, le gouvernement, par la voix des ministres de l’Eau et de l’Assainissement, Serigne Mbaye Thiam, et son second chargé de la Prévention et de la Gestion des Inondations, Issakha Diop, avaient présenté un dispositif de lutte qui épargnerait les populations des désagréments causés par la pluie. Des visites de terrain ont été effectuées à Dakar, Thiès, Louga, Kaffrine, Kaolack, Saint-Louis, Sédhiou, pour des mesures d’urgence. Mieux, les autorités avaient fait état de l’existence d’un dispositif capable de faire face aux fortes pluies dans plusieurs localités.
Un moins après, certaines de ces villes sont actuellement impactées. Alors que la commune de Diourbel réclamait déjà un Plan orsec depuis la semaine dernière, à Saint-Louis et Kaolack, nombreux sont les quartiers qui pataugent. Dans des quartiers de la banlieue de Dakar (Keur Massar, Rufisque 2, etc.) qui n’a pas encore enregistré de fortes pluies, le mal est profond, avec des routes impraticables, des populations obligées d’évacuer des eaux des maisons à l’aide de seaux et autres récipients, après chaque précipitation.
APRE LA BANLIEUE, SAINT-LOUIS, KAOLACK, TOUBA, KAFFRINE PATAUGE
Touba, la cité religieuse qui prépare le grand Magal, a bénéficié d’un plan spécial évalué à 23 milliards de FCFA. Malgré les moyens déployés par les autorités, Touba vit sous la hantise des inondations, à quelques jours d’un du plus grand rassemblement religieux de la Communauté mouride. Au moment où Saint-Louis et Kaolack croulent sous les eaux qui ont désormais élu domicile dans plusieurs sites, à Kaffrine des ménages ont été délogés par les fortes pluies. Le maire de cette ville, Abdoulaye Saydou Sow, par ailleurs ministre en charge de l’Urbanisme et du Logement, accompagné des autorités administratives (Gouverneur et Prefet) était hier, mercredi 30 août 2023, au chevet de ces populations éprouvées pour apprécier les dégâts en vue de trouver des «solutions».
Alors que des canaux et autres réseaux de drainage sont érigés çà et là, de nouveaux quartiers «poussent» à Dakar, sans être accompagné du système d’assainissement nécessaire ; d’où la multiplication des points critiques dans la capitale. Pis, certaines habitations obstruent carrément les voies d’évacuation d’eau. Dans les zones avec des ouvrages d’assainissement, c’est l’entretien de ces infrastructures qui fait défaut. Les canaux d’évacuation des eaux sont bouchés par les ordures, l’ensablement des routes… et le travail d’entretien nécessaire ne suit pas.
UN PLAN DÉCENNAL EN GESTATION EN CACHE UN AUTRE
La question devient lancinante. Alors qu’une évaluation effective du premier programme concocté en 2012, pour une période de 10 ans, pour lutter contre ce fléau reste toujours d’actualité, un nouveau Plan décennal a été sollicité par le président de la République, Macky Sall, depuis 2021. En conseil des ministres, il avait souligné, «la nécessité, pour le gouvernement, de préparer la formulation d’un nouveau programme décennal de gestion des inondations (2023-2033), en cohérence avec le Plan national d’aménagement et de développement des territoires (PNADT) et dans une dynamique de développement de la politique d’assainissement».
En attendant, s’exprimant lors d’un atelier de lancement d’«une étude de définition des mesures liées à l’alerte précoce et à la gestion efficace des infrastructures d’assainissement contre les inondations», le coordonnateur du Projet de gestion intégrée des inondations au Sénégal (PGIIS), Madické Cissé, a déclaré que l’État a investi 717 milliards 795 millions 562 mille 832 francs CFA dans la construction d’ouvrages de drainage et de stockage des eaux pluviales, la restructuration des zones inondables et le relogement des sinistrés, entre 2012 et 2022.
Précisant que ces investissements ont été faits dans le cadre du Plan décennal de gestion des inondations, M. Cissé a indiqué que «de grandes performances sont réalisées depuis 2012 dans le cadre du Plan décennal de gestion des inondations 2012-2022». Ce plan a été «exécuté à hauteur de 717 milliards 795 millions 562 mille 832 francs CFA, avec la construction d’ouvrages de drainage et de stockage des eaux pluviales, pour plus de 200 % du budget initial, la restructuration des zones inondables et le relogement des sinistrés», a révélé Madické Cissé.
Bref, la lutte contre les inondations, c’est plusieurs centaines de milliards dans les eaux, pour un éternel recommencement !
Source : Sudquotidien